Cet été j’ai été amenée à bien des réflexions sur les
jardins, sur mon jardin, mais j’en étais éloignée et tout ce que
je pouvais faire c’est craindre pour la survie de mes dernières
plantations, des bébés arbustes, en l’absence totale de pluie.
Au retour, tout avait survécu et c’était une bonne surprise
car l’année dernière et l’année précédente j’ai vu se
dessécher et mourir presque tous les jeunes arbres que j’avais
plantés en investissant le jardin, en 2012. Un mimosa magnifique, un
pêcher, un cerisier et une vipérine du Cap (bouture volée au Rayol
et qui était devenue un vrai arbre). Je ne sais pas si c’est la
sécheresse qu’on doit incriminer ou une maladie…
Ce jardin, c’est une des raisons principales de notre choix de
la maison, à cause de ses oliviers. La maison a été construite,
comme toutes celles qui l’entourent, dans les années cinquante
dans une oliveraie pluri-centenaire et il y a donc 6 oliviers
impressionnants, qui apportent de l’ombre au jardin. Mais mes rêves
d’enfants grimpant dans les arbres et courant le soir à la fraîche
ont été immédiatement contrariés par la présence des
moustiques-tigres, féroces le matin et le soir. Je crois qu’ils
sont arrivés à peu près en même temps que nous et la seule
solution que je vois serait de transformer le jardin en un parking
bitumé (ils n’aiment pas le minéral). On a quand même investi
dans un « mosquito magnet » pour un résultat relatif.
Fin juin, début juillet, j’ai passé du temps à Amiens, Lille
et Toulouse. Les jardins du nord et du sud-ouest en début d’été
ont quelque chose de magique, on baigne dans le parfum des tilleuls,
le vert de l’herbe, les fleurs épanouies. Je me disais que l’eau,
décidément, est l’alliée principale du jardinier, que son
absence le condamne à des stratégies très particulières. Ici, à
Toulon, les très beaux jardins ont tous été plantés au pied d’une
pente calcaire où naissent des sources abondantes. Faute d’eau –
on ne peut pas arroser abondamment – beaucoup de plantes
« végètent » : elles survivent mais cinq ans après
la plantation elles n’ont pris que quelques centimètres. Sauf les
majestueuses acanthes, envahissant deux fois par an tous les coins
inoccupés, les oxalis jaune citron ou les lauriers-tins qui
colonisent mon jardin, les pervenches et les asparagus, les
valérianes, les marguerites du Cap, les freezia. Au printemps ce
sont les fleurs sauvages qui font le spectacle, c’est très beau.
Mais l’été est la saison de la survie, pas question de dépenser
son énergie dans des floraisons, à part les lavandes et le grand
bougainvillier sur le mur.
Je me suis pas mal inspirée d’un beau livre : « Pour
un jardin sans arrosage » d’Olivier Filippi, qui a une
pépinière près de Montpellier. A la plantation (en automne) faire
une grande cuvette d’arrosage où on pourra déverser 30 à 40
litres d’un coup, et seulement quand la plante « baisse les
oreilles », pour l’obliger à « descendre » ses
racines profondément, et seulement les premières années ;
pailler ; rassembler les « soiffardes » dans un seul
massif qu’on arrosera mieux...et laisser mourir celles qui
décidément ne s’acclimatent pas. Parce que l’eau ce n’est pas
seulement l’arrosage, c’est aussi l’humidité ambiante, dont
certaines plantes ont toujours besoin. Un framboisier en
méditerranée, c’est à oublier.
J’ai installé un réseau discret d’arrosage goutte à goutte,
pour aider certaines à survivre, en arrosant tous les dix jours
pendant deux ou trois heures les plantes plus âgées qui en ont
besoin.
Je crois que sur un balcon il faut des pots profonds et si on s’en
va longtemps un système d’arrosage automatique au goutte à goutte
aussi. Même la plante la plus sobre ne survivra pas une fois le pot
complètement à sec. Mais il y a beaucoup de plantes grasses qui
résistent pas mal quand même.
L’autre inconvénient du climat méditerranéen c’est
l’absence de froid, qui permet aux ravageurs de prendre leurs
quartiers d’hiver en toute quiétude et de prospérer dès le
printemps. Cochenilles, araignées rouges, mouche de l’olive, j’ai
renoncé à mener un combat inégal. J’élimine les plantes trop
envahies, voilà tout. Et une année de prolifération de rats des
champs m’a dissuadée de mettre les épluchures dans le compost et
de planter un potager (en plus je suis souvent absente l’été).
Mais par contre nous avons Marguerite, une jeune tortue d’Hermann
qui est venue toute seule dans ce jardin un peu sauvage, depuis la
« colline » toute proche, et qui vient boire ou croquer
un fruit que nous lui proposons...et de temps en temps un hérisson
ou un renard viennent faire un tour.
Voilà, pour compléter ce portrait en demi-teinte, l’amandier
et les agrumes donnent vaillamment trois fruits par ans, à part le
citronnier nettement plus âgé et plus généreux. Je me dis qu’il
faut encore plus de patience au jardinier méditerranéen
qu’ailleurs...ou beaucoup d’eau à disposition, mais ce n’est
pas écologiquement défendable.
J’espère que vos retrouvailles avec vos jardins ont été
fructueuses et heureuses,